Du fait de son histoire et de la nature encyclopédique et pléthorique de ses collections iconographiques, la Bibliothèque nationale de France rencontre de longue date des problématiques liées au
Du fait de son histoire et de la nature encyclopédique et pléthorique de ses collections iconographiques, la Bibliothèque nationale de France rencontre de longue date des problématiques liées au traitement intellectuel d’importants ensembles d’images multiples, en conflit avec sa tradition héritée de la monographie et de l’exemplaire unique. En son sein, le Cabinet des Estampes (aujourd’hui département des Estampes et de la photographie) est confronté depuis le XIXe siècle au problème de classer et décrire au mieux une quantité croissante d’images : d’abord posée par les estampes, l’affiche et l’imagerie, cette question l’est a fortiori par la photographie (d’art, documentaire ou de presse) dont le dépôt légal s’officialise en 1925. Par les multiples instruments de recherche, techniques de classification, normes d’indexation tour à tour assimilées, améliorées et inventées pour faire connaître ces ensembles photographiques à des publics aux besoins et usages divers et changeants, le cabinet/département représente un véritable cas d’école. Traduisant le caractère hybride des missions de l’institution (entre bibliothèque et musée) et les multiples valeurs d’usage et possibilités de lecture associées à la photographie, le mode de classement de cette dernière y a évolué d’une approche documentaire à une classification par auteur. Parallèlement, l’accueil de grandes donations de collectionneurs, de photothèques documentaires ou d’agences de presse témoigne d’un souhait constant d’assurer une fonction de documentation par l’image. Faute de moyens humains et de temps pour la description de tels ensembles, les outils mis en place par les anciens possesseurs ont été conservés et exploités comme modes d’entrée auxdits fonds. Ces fichiers ou répertoires constituent aujourd’hui une strate très instructive de nomenclatures, logiques de classement et d’indexations ayant varié selon les époques et les usages. L’informatisation du catalogage a marqué un changement net de paradigme : tout en permettant d’intégrer ces outils hérités de l’extérieur, elle a permis – par la multiplication des indexations - de décupler les voies d’accès aux images, au-delà du cadre réducteur du classement physique. Cette nouvelle technologie a conduit à une normalisation des formats de description, à l’enrichissement collectif de langages d’indexation, à la mise en œuvre de référentiels… Permettant le renseignement de nouveaux champs (détails techniques, genres iconographiques, valeurs d’usage, vocabulaire esthétique…), ces améliorations tentent de répondre aux attentes toujours plus variées et pointues des chercheurs, voire de les anticiper. Mais ces modalités de description toujours plus affinées entrent en tension avec l’augmentation exponentielle des images à traiter (entrée massive des derniers fonds argentiques, extension du dépôt légal aux productions numériques). Comment répondre à ces défis contradictoires de donner à voir l’ensemble des collections pour permettre aux chercheurs de s’emparer de nouveaux corpus et aux iconographes de sortir des ornières tout en conservant une haute qualité de données attachées aux images décrites ? Dans le contexte concurrentiel du web, la question mérite d’être posée : si les institutions publiques ne peuvent faire le poids en termes de moyens et de réactivité, n’ont-elles justement pas un rôle majeur à jouer par la mise à disposition d’ensembles iconographiques alternatifs, une médiation humaine de qualité et un haut degré de renseignement sur les contextes de production et pedigrees de leurs images ?
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